Longtemps ignoré par l’historiographie, l’usage de la terre crue massive dans la construction médiévale rencontre un intérêt renouvelé de la part de chercheurs attentifs à la fois, à la relecture de fouilles anciennes, aux résultats de certaines plus récentes, à l’analyse d’élévations encore en place, ainsi qu’aux anciens termes spécifiques liés à ce type d’édifices. Cet état de la question se propose de présenter d’abord le versant historiographique du problème, prolongé par l’évocation des techniques de mise en œuvre de la terre crue et par les aspects proprement architecturaux (1).
Aspects historiographiques et renouvellement de la question Dans l’histoire de la recherche, le thème de la terre crue associé à la construction médiévale renvoie d’abord à une contradiction. D’une part, on pressent de plus en plus la grande importance du matériau terre dans plusieurs régions du Midi, du bassin de la Garonne à la vallée du Rhône, et d’autre part, on constate jusqu’à ces dernières années l’indigence des données archéologiques, que ces données proviennent de fouilles ou d’élévations conservées.
Il y a encore peu de temps, on pouvait sans doute affirmer qu’on connaissait bien mieux les constructions de terre protohistoriques plutôt que celles du Moyen Âge, ceci au moins pour le Midi méditerranéen grâce à différents travaux et, entre autres, à une synthèse pour la Protohistoire et l’Antiquité (2). Le fait même d’avoir prévu, pour la première fois à notre connaissance, dans le cadre de ce colloque, une contribution spécifique sur la maison médiévale en terre massive, illustre aussi le retard pris par la recherche dans ce domaine. Les raisons de ce déficit tiennent à trois causes principales.
On peut d’abord évoquer les difficultés de reconnaissance des vestiges en terre crue lorsqu’ils sont observés en fouille. Tel est le cas dans la publication des recherches sur le village castral déserté de Montaigut en Albigeois, dans les années 1960. Malgré des observations minutieuses, les auteurs utilisent l’expression de « fantôme de murs » (3) qui en réalité, renvoie très certainement à des murs de terre, non reconnus en tant que tels par les fouilleurs. Ces derniers ne voyaient alors que des emprises de murs épierrés comblés par de l’argile ! Il s’agit sans doute ici d’un cas extrême, où les chercheurs n’imaginaient même pas qu’aient pu seulement exister des murs en terre. À l’occasion d’une fouille beaucoup plus récente, dans un ancien faubourg de Toulouse au bas Moyen Âge, sur le site du jardin du Museum d’Histoire Naturelle, une opération préventive a reconnu un bâti en terre crue.
Mais son identification n’a été possible qu’en fin de fouille, tant le contexte rendait difficile la visualisation de bases de murs en terre massive, le matériau ayant été puisé dans un substrat graveleux (4). Toujours à Toulouse, une autre fouille préventive vient malgré tout nuancer ces difficultés de reconnaissance avec des murs en terre interprétés comme des élévations en terre coffrée, pour une maison canoniale du XVe siècle, sur le site du Lycée Ozenne (5).
Une autre raison qui explique encore la faiblesse de nos connaissances est la rareté des études précises de bâti, en milieu rural ou urbain, jusqu’à une époque très récente en tout cas. D’où, pour l’instant, l’importance encore assez réduite des informations sur le bâti en terre à partir de ce type d’études.
Enfin, la troisième raison de ce déficit sur la terre crue médiévale tient à un a priori défavorable: pendant longtemps, on a considéré la terre comme un matériau non noble et donc de peu d’intérêt, à côté de la brique cuite ou de la pierre. Par exemple, dans un article de la fin du XIXe siècle sur les petites villes fortifiées du Toulousain, sont évoqués les « restes de murailles dénués de tout caractère » à propos de vestiges d’enceintes en terre crue, considérées comme édifiées « en cailloutis » (6). Il faut aussi se demander dans quelle mesure cette déconsi- dération a pu peser jusqu’à une époque récente, de façon consciente ou non. À cette idée peut s’ajouter un autre a priori concernant la fragilité supposée de la terre crue. Dans les années 1980, Jean-Marie Pesez écrivait: « la construction en pisé… échappe à l’observation: il ne faut guère compter en retrouver des témoins anciens en place, la durée d’une maison de terre étant quand même limitée et inférieure au siècle » (7). Or, aujourd’hui, cette opinion est en contradiction totale avec les observations archéologiques les plus récentes.
Effectivement, depuis quelques années, diverses recherches viennent rappeler ou signaler avec insistance la place de la terre crue parmi les matériaux de construction au Moyen Âge, avec leur prolongement à l’Époque moderne. Ce nouvel intérêt pour la terre crue ne fait que compléter une préoccupation déjà bien illustrée par les protohistoriens et les antiquisants. De ce point de vue, l’historiographie récente a été marquée par une première rencontre interdisciplinaire et diachronique (de la Préhistoire à nos jours) sur la terre crue, à Montpellier en 2001, publiée en 2003 (8). Une deuxième rencontre du même type s’est tenue en 2005 à Villefontaine (Isère), publiée en 2007 (9). Pour le Moyen Âge, ces dernières années ont vu converger et se confronter divers résultats à l’échelle du Midi, spécialement entre le Toulousain et la Provence rhodanienne. On peut les résumer de la façon suivante.
Dans le bassin de la Garonne, en particulier en Midi-Pyrénées, on doit à un architecte,Alain Klein, un premier inventaire raisonné du patrimoine bâti en terre, toujours en élévation, inventaire qui révèle la variété des types d’édifices concernés mais aussi la variété des techniques employées (10). Ce travail concerne surtout l’Époque moderne mais aussi en partie le Moyen Âge, car il pose quelques questions relatives à la datation de certaines élévations. Dans l’ouest de l’Aude, en Bas-Razès et Carcassès, ont pu être repérés plusieurs exemples d’élévations en terre, en milieu villageois et urbain, où domine une technique de terre massive en couches superposées séparées par des végétaux. Quelques élévations de ce type ont pu livrer des tessons de céramiques piégés dans la terre au moment de sa mise en œuvre, tessons datables du bas Moyen Âge (11). Toujours dans l’étude d’élévations, quelques villes du Midi méditerranéen ont commencé à révéler un bâti en terre crue, jusqu’ici pratiquement insoupçonné dans ces agglomérations, comme à Perpignan, Béziers ou Carpentras (12), dans des secteurs de faubourgs de la fin du XIIIe ou du XIVe siècle. Ces résultats sont à rapprocher d’autres repérages effectués à Carcassonne, dans la Ville Basse, mais aussi dans des localités de moindre importance comme Montréal ou Castelnaudary, dans l’Aude.
De telles découvertes sont à confronter avec d’autres observations issues de fouilles en milieu urbain ou rural et qui ont, elles aussi, tendance à se multiplier: outre les deux exemples de fouilles toulousaines déjà citées, des observations ont été par exemple réalisées à Marseille, Montpellier ou Narbonne (13). En milieu rural, parmi les observations majeures, il faut rappeler l’existence de maisons de terre du XIIe siècle sur le site déserté de L’Isle- Jourdain dans le Gers (14), de murs de terre d’époque carolingienne dans un habitat rural de la région d’Arles (15), et d’autre part, dans la moyenne vallée du Rhône, entre Valence et Montélimar, plusieurs exemples de constructions en terre massive pour le Moyen Âge central. Ces dernières données proviennent des fouilles préventives sur le tracé du T.G.V. Méditerranée (16). Dans la même région, le cas de la ville de Valence a été récemment pointé, à cause de l’exhaussement notable de son emprise au cours de l’Antiquité et du Moyen Âge, exhaussement provoqué par les générations de constructions en terre qui s’y sont succédé (17). Enfin, la question de la terre crue médiévale doit être aussi abordée à travers la lecture ou la relecture des documents d’archives, médiévaux ou modernes. Il faut retenir ici deux mots-clés à partir des parlers vernaculaires:
le mot paret et le mot tàpia (18). En Toulousain et régions limitrophes, il ressort que le terme occitan paret (parfois francisé en paroit, ou paroi) a évidemment désigné un mur mais plus spécifiquement un mur de terre. Ce sens est par exemple précisé au XVIIe siècle pour les murs de l’église de Plagne, en Comminges: « les murailles sont des parois de tap » (19), tap renvoyant au matériau qu’est la terre. Fondé sur le mot paret, on trouve par ailleurs le terme paredièr pour désigner le maçon spécialisé dans la mise en œuvre de la terre, terme relevé aussi bien dans l’Aude qu’à Toulouse et qu’en Tarn-et-Garonne à l’Époque moderne (20). En domaine sud-occitan, de la Gascogne à la Provence, avec un prolongement en Dauphiné, les termes tap, tàpia, tàpi, tepa, d’origine pré-latine (francisés en tapie, tépe), désignent la terre mise en œuvre pour la construction et par extension, ont pu aussi désigner les constructions elles-mêmes. Au début du XVIIe siècle, à Montpezat en Tarn-et-Garonne, on prévoit la construction d’une maison de la façon suivante: « … seront tenus bastir et ediffier lad. maison a ung estache de
murailles de tapie faite de terre que icelluy Marsilhac et Mercadié prendront lad. terre de la mesme piesse de terre où led. ediffice ce doibt construire » (21). Au XVIIIe siècle, à Castelnaudary, lors de la vente d’une maison, on précise que tous les murs du rez-de-chaussée sont « construits en terre tapie, tout comme les autres murs des autres cotés, vieux et anciens » (22). Par ailleurs, il ne fait aucun doute que le mot tàpia était bien en usage au Moyen Âge, par exemple en Lauragais au XVe siècle (23).
Il semblerait qu’en Gascogne et Languedoc, tàpia et, sans doute en Provence, tàpi, aient servi indistinctement à nommer les techniques de bauge et de pisé, toutes les deux relevant de la terre dite massive, mais représentant deux types de procédés bien différenciés.
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Les procédés de construction mis en œuvre
Il convient d’insister sur les difficultés que soulève l’identification de chaque mode de construction en terre, que ce soit dans le cadre de fouilles archéologiques lorsque les vestiges sont arasés et enfouis, ou à la découverte de murs conservés en élévation. Dans le premier cas, les murs de terre ont subi de telles transformations en raison de la disparition de la composante végétale des matériaux et des effets du tassement que les indices nécessaires à la reconnaissance de tel ou tel procédé peuvent avoir quasiment disparu. Dans le second cas, les remaniements effectués au cours des siècles, ainsi parfois que l’érosion si les parois sont exposées aux intempéries, affectent considérablement l’aspect de leurs parements. En toutes circonstances, la fouille des murs est recommandée, mais elle est rarement réalisable lorsque ceux-ci doivent être intégrés dans un programme de réhabilitation d’immeuble. À défaut, le grattage des parements sur deux à trois centimètres d’épaisseur peut s’avérer suffisant pour mettre une technique en évidence.
Les études de terrain menées au cours des dernières années permettent d’avoir une idée assez claire des choix techniques qui s’offraient aux constructeurs de la fin du Moyen Âge puisque l’on reconnaît désormais à peu près sans ambiguïté des constructions en pisé et d’autres en bauge, celles-ci se présentant sous des formes diverses.
L’alternative proposée par la brique crue moulée, dont l’usage est bien connu aux périodes protohistorique et romaine, ne semble concerner que le plein Moyen Âge, entre le Xe et le XIIe siècle en Roussillon et en Languedoc (24). Des structures en briques sont signalées à Bellegarde (Gard) dans un contexte du Xe siècle (25), à Narbonne (Aude) dans un habitat datant du Xe au XIIe siècle (26) ainsi que sur plusieurs gisements du Roussillon appartenant aussi à la période Xe -XIe siècle (27). On ne connaît actuellement aucune attestation ultérieure. Bien évidemment, la reconnaissance d’un procédé ou d’un autre ne constitue pas une fin en soi: elle contribue à affiner l’histoire des techniques de construction. Et, si un grand pas a été franchi pour la période qui va de la fin du XIIe siècle à la fin du XIVe siècle, il reste à préciser la genèse des modes de construction en terre crue au cours des siècles antérieurs et à étudier leur devenir à partir de la Renaissance. C’est dire toute l’importance que l’on doit accorder à l’emploi d’un vocabulaire technique précis si l’on veut éviter de brouiller les pistes d’investigation (28).
La construction en pisé
Ce type de construction extrêmement normalisé possède des traits canoniques qui doivent permettre, la plupart du temps, une identification certaine. La terre est mise en place sans préparation préalable, damée entre de grandes planches (les banches) qui sont reliées entre elles par des traverses (les clés). Les banches mesurent entre 1,50 m et 3 m de long pour une hauteur courante de 0,80 m à 1 m et l’épaisseur des murs est au moins égale à 0,40 m. Le matériau utilisé sans ajout d’eau présente généralement une granulométrie hétérogène et c’est le compactage qui lui confère sa cohésion. Le fait qu’il soit « sec » permet de démouler chaque banchée à peine terminée et de construire la suivante car le travail s’effectue en assises, en déplaçant les banches latéralement tout autour d’une pièce ou d’un bâtiment (fig. 1). Les temps de séchage entre les assises sont variables en fonction du climat et de la saison. Selon les périodes, les lieux, les habitudes constructives des maçons, les dimensions des banches et des clés sont différentes et d’autres matériaux que la terre peuvent intervenir. Le plus courant est la chaux sous la forme de cordons répandus à la périphérie des banchées, soit entre les assises, soit parfois entre les lits de damage à l’intérieur de chaque assise.
On trouve aussi, mais plus rarement, entre les lits de damage des rangées de dalles de pierres, de tessons de tuiles ou de céramiques qui donnent une meilleure accroche aux enduits (29). L’aspect final d’un mur de pisé est celui d’un appareil cyclopéen de terre que lui confère la succession latérale et verticale des banchées. La mise en évidence de certains indices, tels des limites de coffrage, des trous de clés, des lits de damage, ou encore d’un matériau assez granuleux, conduit à une interprétation qui n’est pas contestable.
Jusqu’à une période récente, la construction en pisé était liée en France à deux ensembles principaux, d’une part le Forez (département de la Loire) entre Lyonnais et Auvergne, où étaient connus les plus anciens témoignages datés du XIIIe siècle (30) et, d’autre part les régions de Lyon et du Dauphiné, d’où proviendrait précisément le terme « pisé » (31). L’origine de la technique semblait par conséquent devoir être recherchée dans les vallées du Rhône, de l’Isère et de la Loire à la fin de la période médiévale. Les données sont totalement changées actuellement, depuis que des fouilles archéologiques et que quelques découvertes de murs conservés dans du bâti contemporain ont révélé l’existence de constructions en pisé dans le sud de la France à la même époque que dans la Loire, voire antérieurement. Les premiers exemples remontent à la fin du XIIe siècle à Marseille (32), mais les découvertes foisonnent pour les deux siècles suivants, aussi bien en Roussillon (Perpignan) que dans l’Aude intérieure (La Digne d’Aval) ou sur le littoral méditerranéen (Narbonne, Béziers, Montagnac, Lunel) (33) (fig. 2, 3 et 4). De l’autre côté des Pyrénées, dans la Péninsule Ibérique, le pisé ainsi que d’autres solutions à base de matériaux moulés qui en dérivent ont été introduits et développés par les Arabes et/ou les Berbères dès le IXe siècle en Andalousie (34). En Catalogne, non musulmane, il semble que la construction en pisé soit couramment pratiquée au moins au XIIIe et au XIVe siècle (35).
À mesure que s’impose la logique d’une propagation de la technique à partir du Maghreb puis d’Al-Andalus vers le nord de la péninsule et outre Pyrénées, l’hypothèse d’un second foyer d’invention dans le Forez perd parallèlement de sa crédibilité (fig. 5). En l’absence d’antécédent et de phase de tâtonnements, l’émergence soudaine et complètement maîtrisée d’une technique aussi spécifique et qui présenterait là les mêmes caractères qu’en Espagne semble douteuse.Aussi faut-il peut-être désormais envisager un développement à partir de la basse vallée du Rhône (Marseille), même si les étapes demandent à être précisées par l’archéologie.
À partir de la Renaissance, les situations évoluent distinctement selon les régions. Alors que les territoires rhodaniens au sens large (Valentinois, Dauphiné, Lyonnais, Bresse) et l’Auvergne continuent à perfectionner l’architecture de pisé qui s’applique non seulement à l’habitat mais aussi à toutes sortes d’édifices publics civils et religieux (36), le Languedoc et le Roussillon paraissent délaisser ce procédé au profit des maçonneries de pierre.
En Provence, des textes rédigés aux XVIIe et début XVIIIe siècle attestent la permanence de la technique à l’Époque moderne alors qu’actuellement aucune découverte ne l’illustre concrètement (37). Les constructions en pisé sont en revanche nombreuses pour la période qui s’étend du milieu du XVIIIe siècle au début du XXe siècle dans des secteurs géographiques reliés au Rhône et à la Durance, de Carpentras à Arles (38). Dans le sud-ouest du pays, l’essor de l’architecture en pisé actuellement daté du XVIe siècle pourrait remonter aussi au XIVe siècle, comme en Languedoc (39) et la pratique en a toutefois été conservée dans les départements des Hautes-Pyrénées et du Tarn- et-Garonne jusqu’à l’aube du XXe siècle (40) (fig. 6).
La construction en bauge
À la différence du pisé qui se singularise par des caractéristiques quasiment immuables à travers l’espace géographique européen et le temps, la bauge ne représente pas une technique unique mais une pluralité de techniques. Cette diversité explique les difficultés que l’on a longtemps éprouvées pour décrire la construction en bauge. Le matériau de base est grosso modo toujours le même, un mélange de terre et d’eau additionné de fibres végétales ou animales, et le principe identique puisqu’on utilise cette pâte sous une forme plastique. Toutefois, l’avancement de la recherche au cours des dix dernières années, favorisé par un nombre rapidement croissant de découvertes, permet aujourd’hui de classer sous le terme de bauge différentes manières de construire en terre massive, sans recours à des coffrages.
La méthode la plus répandue de nos jours, que ce soit dans la construction contemporaine pour certains pays (Afghanistan, Yémen, Afrique Noire…) ou au travers du patrimoine récent, antérieur à la seconde guerre mondiale, en Europe (Allemagne, Tchéquie, Grande-Bretagne, Italie…) y compris dans le quart nord-ouest de la France (en Normandie, Bretagne, Vendée) et dans le sud-ouest (Haute-Garonne), consiste à dresser de hautes assises par mottes juxtaposées ou projetées, soit à l’aide de fourches, soit manuellement, en fonction de l’outillage disponible. Les parements sont ensuite égalisés, parfois par talochage de la terreore humide, pl encus souvent par la retaille, le raclage ou le grattage du matériau sec, ce qui contribue à effacer les indices du montage. La disparition des mottes et même des assises peut alors donner aux murs un aspect complètement homogène (fig. 7).
On a identifié ce type de construction dans des bâtiments tardo-médiévaux du Languedoc central, par exemple à Montagnac (fig. 8) et à Montpellier (41) ainsi qu’à Carpentras dans la vallée du Rhône (42). Un second procédé répandu naguère en France (Haute-Garonne, Gers, Basse-Normandie, Hainaut) élève la bauge par assises minces, séparées ou non par des lits de végétaux. Des variantes se distinguent selon que les assises sont réalisées de façon continue (couches « filantes ») ou à l’aide de pains de terre plus ou moins réguliers.
Ce mode de fabrication reste bien lisible et ne pose pas de problème d’identification même si les parements ont été redressés. Au bas Moyen Âge, il représente une spécificité des régions occidentales du Languedoc-Roussillon (Carcassès, Razès, plaine du Roussillon, Biterrois) ainsi que le révèlent actuellement un patrimoine médiéval bien conservé dans certains villages du bassin moyen de l’Aude (43) et de récentes études de bâtiments (Perpignan, Béziers, Montagnac, Lunel (44) (fig. 8 et 9).
Un dernier type de bauge qui réalise un compromis entre les deux autres procédés correspond peut-être à des interprétations locales de ceux-ci. Les attestations actuelles que l’on rencontre dans la région de Toulouse proviennent de bâtiments annexes plutôt que d’habitations (45). Les parois sont constituées par un empilement de mottes ou de galettes, selon que les éléments sont plus sphériques ou plus aplatis, avec des variantes infinies résultant de la teneur en eau, de la présence ou de l’absence de végétaux enrobant les mottes, de leur tassement ou de leur juxtaposition. Les parements ne sont habituellement pas retouchés. Quelques exemples ont été repérés dans des immeubles du bas Moyen Âge, où il s’agit parfois de murs porteurs (Montagnac, fig. 10), mais fréquemment de structures non porteuses dans lesquelles les mottes constituent le hourdis de pans de bois (Clermont-l’Hérault) ou des bouchages de portes (Perpignan).
Si, à l’instar du pisé, la bauge connaît un essor remarquable au cours des XIIIe et XIVe siècles dans le cadre de faubourgs établis autour des villes romanes, son ancienneté sur le sol français n’est en revanche pas douteuse (fig. 5).
En Roussillon, plusieurs découvertes signalent des usages diversifiés entre le VIIe et le XIe siècle, avec des mises en œuvre à base de pains de terre et d’autres sous des formes plus massives (46); dans le Bas-Razès (Aude), comme dans la plaine d’Arles, des habitats carolingiens ont montré aussi des structures de bauge massive (47). Enfin, des études consacrées à l’habitat rural de la vallée du Rhône mettent en lumière l’existence d’une architecture en terre crue, localisée entre Valence et Montélimar. Dans cette région, et pour cette période, si l’emploi du pisé n’a pas pu être démontré, il est en tout cas certain qu’une partie des constructions édifiées entre le Xe et le XIIe siècle – au moins celles dont les murs épais de 0,80 m ne disposaient pas de solin en pierre – était en bauge (48).
Après la période médiévale, l’architecture en bauge semble connaître un fort recul dans la majeure partie des régions méridionales de la France. Elle reste néanmoins peut-être en usage en Provence rhodanienne tout comme le pisé, selon le sens donné au mot tapie dans certains prix-faits des XVIIe et XVIIIe siècles (49) et elle se maintient en tout cas sans équivoque dans les départements de Midi-Pyrénées où elle s’illustre par un riche patrimoine édifié entre le XVIe et le début du XXe siècle (50). Paradoxalement, ce sont des régions de l’ouest de la France – Normandie, Bretagne, Vendée – où les techniques de la terre massive ne sont pas encore connues pour le Moyen Âge qui recèlent le plus grand nombre de bâtiments en bauge des XVIIIe et XIXe siècles. Il est clair que dans le contexte urbain de la fin du Moyen Âge les procédés de construction à base de terre crue permettent d’employer des matériaux disponibles sur place (gratuits, sans transport) pour réaliser des immeubles de façon rapide et peu onéreuse. Le même matériau se pliant à différents types de mises en œuvre, les choix d’une technologie ou une autre sont encore à expliciter : motivation culturelle, savoir-faire des maçons, faisabilité sur place, etc., d’autant plus que la présence conjointe de murs en bauge et en pisé est parfois observable dans une même unité bâtie : Perpignan (rue de l’Anguille et îlot Saint-Mathieu), Béziers (Hôtel de la Mercy), Montagnac, Lunel…
En ce qui concerne la bauge, tant la diversité des procédés que l’existence d’attestations remontant au VIIe siècle permet d’envisager des origines locales, autochtones, avec des solutions techniques adaptées à la fois aux matériaux du sous-sol et aux savoir-faire locaux. On note des évolutions sensibles vers des procédés distincts, propres à des petites entités régionales, sans doute amorcées au cours du Moyen Âge et en tout cas avérées à la fin de la période (technique des couches minces avec lits de végétaux, technique des mottes agglomérées en hautes assises). Il en va différemment du pisé, ou terre banchée, car au vu des données dont on dispose aujourd’hui la technique paraît bien empruntée à une autre culture.
Les arguments qui pèsent en faveur de cette hypothèse sont, en premier lieu, l’absence de vestiges antérieurs à la fin XIIe -début XIIIe et, par conséquent, une « apparition » qui semble à la fois rapide et très disséminée sur le territoire (La Digne d’Aval, Perpignan, Narbonne, Béziers, Montagnac, Lunel, Marseille, Montbrison). En second lieu, les caractères standardisés des pisés rencontrés en ces différents points de France confortent l’idée qu’il s’agit de la transposition d’un modèle et c’est évidemment l’architecture musulmane (arabe ou arabo-berbère) développée en Espagne et en Afrique du Nord qui sert de référence. La prudence incite toutefois à envisager aussi un déficit des données archéologiques et historiques pour les périodes antérieures au XIIIe siècle. Il faut souhaiter que les recherches futures parviennent à établir de quelle manière et par quels vecteurs, s’il s’agit bien d’un emprunt technologique, s’est opérée cette transmission et quels en ont été les itinéraires.
L’architecture des maisons en terre massive
À la fin des années 1990, les informations sur la construction en terre crue dans l’habitat civil étaient trop lacunaires pour permettre aux chercheurs de développer une réflexion aboutie sur ce type d’architecture. La courte synthèse proposée sur ces problématiques de la maison en terre au Moyen Âge dans Cent maisons médiévales en est l’illustre exemple (51). Cet aspect particulier de la maison médiévale apparaît depuis le changement de siècle avec des découvertes qui se sont multipliées à un rythme soutenu dans la première moitié de la décennie si bien qu’il est désormais possible de commencer à mesurer l’ampleur du phénomène de construction en terre dans nos villes médiévales et de retracer les grandes lignes directrices de cette architecture vernaculaire.
L’essentiel de ces nouvelles données sur l’architecture de terre médiévale provient du milieu urbain et correspond à la phase d’extension des agglomérations située entre le début du XIIIe siècle et le milieu du XIVe siècle.
Ainsi, l’archéologie permet, par la variété de ses interventions (repérages, fouilles, études du bâti, etc.) de mieux connaître les quartiers de lotissements médiévaux et de montrer les particularismes liés au mode de construction en terre. La conséquence est un renouvellement de notre perception de ces nouveaux quartiers de la ville médiévale (fig. 11): aurait-on pu imaginer il y a encore cinq ans que la moitié de la superficie de Perpignan ou de Carpentras était couverte de maisons en terre au début du XIVe siècle ?
L’analyse architecturale de ces maisons en tàpia se fonde sur la qualité des informations apportées par les études archéologiques du bâti. Il est évident que les interventions de ce type ont généré une documentation de premier plan qui offre des possibilités importantes de réflexion et de restitution. En effet, lorsqu’un immeuble étudié livre des élévations complètes (pans de toitures, traces de poutraisons, etc.), « fossilisées » dans les surélé- vations tardives (fig. 12), il est possible de pousser l’analyse plus loin avec l’avantage d’un contexte de recherches qui est nettement favorisé par l’aspect sériel de cette forme d’architecture conçue pour répondre à des besoins d’urbanisation rapide.
Mais ces découvertes récentes, même si elles révolutionnent d’une certaine manière la proportion entre la construction en pierre et en bois et celle en terre, peuvent paraître réductrices à certains égards. Il est évident que l’éclairage archéologique est uniquement apporté pour une période bien précise, sur les quartiers de lotissements qui aujourd’hui font l’objet d’investigations liées à leur réhabilitation croissante après des décennies de paupérisation (fig. 13). Pour d’autres quartiers urbains ou pour le monde rural, les données ne sont pas encore à la hauteur de nos espérances. Or, le processus de construction des lotissements en terre des quartiers suburbains médiévaux pourrait être aisément transposé en milieu rural. Il n’y a aucune raison pour que les villages ou l’habitat dispersé du XIIIe et du début du XIVe siècle n’aient pas fait appel aux techniques de construction en terre. Un parallèle contemporain peut être mis en évidence pour illustrer cette hypothèse: à partir du début du XIXe siècle on assiste en Vaucluse à un grand mouvement de colonisation de l’espace rural par de nouvelles et nombreuses exploitations agricoles qui se substituent aux grands domaines de l’Ancien Régime (52). La réponse architecturale à ce développement est alors apportée par la technique du pisé, rapide et peu onéreuse. L’archéologie rurale pourra probablement livrer à l’avenir des découvertes d’habitats en terre, par exemple sur des sites désertés au milieu du XIVe siècle.
Enfin, on peut légitimement s’interroger sur les noyaux urbains constitués antérieurement au XIIIe siècle. À l’évidence, lorsque l’on étend les villes par de nombreux lotissements en terre (Carpentras, Perpignan, Narbonne, Toulouse, Montpellier, etc.), on assiste en parallèle à une reconstruction massive de l’habitat situé à l’intérieur des anciennes enceintes d’époque romane (53). Les matériaux utilisés dans la construction sont les plus nobles (pierre, brique) et contribuent à différencier, au travers de l’architecture, les élites urbaines et les populations de souche des nouveaux arrivants. Bien évidemment ce constat implique une hiérarchisation du matériau: dans cette perspective, la terre crue est l’apanage du pauvre ou du nouveau venu.
Cependant, un tel constat, sans doute un peu trop simpliste, peut être nuancé puisque les textes ou l’archéologie apportent des informations qui témoignent de l’utilisation de la terre conjointement avec la pierre (54). Ainsi, dans la demeure médiévale de qualité des XIIIe -XIVe siècles, il n’est pas rare de trouver des parties secondaires édifiées en terre crue (cloisons, murs de refend, annexes, etc.) qui permettent une substantielle économie de moyens. Mais plutôt qu’une imitation « honteuse » d’un mode de construction généralisé dans les quartiers en marge, l’utilisation restreinte de la terre dans la maison médiévale patricienne du XIIIe siècle ne serait-elle pas le dernier soubresaut d’une habitude séculaire ? Par conséquent, on peut se poser la question de la place de l’architecture de terre dans l’habitat urbain des XIe et XIIe siècles. À nouveau l’archéologie contribue à éclairer notre discours : il est probable qu’à Valence, la construction en terre ait été généralisée entre l’Antiquité et le Moyen Âge tandis qu’à Marseille la terre semble largement utilisée dès le XIIe siècle, dans des quartiers commerçants et industrieux du centre de la ville romane (55).
Après ces quelques considérations générales sur le contexte d’étude de l’architecture en terre médiévale, il convient de présenter l’aspect le plus important de l’avancée de la recherche dans ce domaine: le lotissement et sa maison.
La maison en terre massive dans les lotissements des XIIIe et XIVe siècles Nous l’avons déjà évoqué : l’archéologie a récemment contribué de façon remarquable à mettre en évidence la maison en terre édifiée dans des zones de lotissements qui caractérisent l’expansion territoriale des villes entre le XIIIe et le milieu du XIVe siècle. Le hasard des découvertes, s’il ne permet pas d’avoir une vue exhaustive sur la globalité des villes du sud de la France, apporte cependant suffisamment d’indices pour pouvoir mesurer l’importance des constructions en terre dans ces quartiers et pour en tirer les conclusions qui s’imposent.
On constate que des villes – et non les moindres – comme Montpellier (56), Toulouse (57), Narbonne (58), Béziers (59), Carcassonne (60) et Marseille (61) sont touchées par la construction en terre dans les quartiers de faubourgs alors que des villes comme Perpignan (62) ou Carpentras (63) semblent s’étendre exclusivement avec ce type d’architecture. Bien évidemment les agglomérations secondaires et les villages paraissent suivre l’exemple de leurs grands voisins. Ainsi, ce constat a pu être établi récemment pour les centres anciens de Trèbes dans l’Aude et de Montagnac ou Lunel dans l’Hérault où l’extension de la superficie villageoise est caractérisée par ce mode de construction en terre (64).
Le lotissement en terre
Aucune spécificité propre au mode de construction en terre ne semble dicter l’organisation du lotissement. On trouve la même diversité d’implantation du parcellaire que dans d’autres quartiers comparables où la terre n’est pas choisie comme matériau. Ainsi, les lotissements de Montferrand, édifiés en pierre (65) ou d’Avignon édifiés en pans de bois (66) ne sont-ils pas vraiment différents de ceux de Perpignan ou de Carpentras. Dans ces deux dernières villes, le développement des quartiers suburbains paraît très rapide ou du moins semble débuter par un changement de statut de la cité lorsque Perpignan accueille la résidence de la cour aragonaise ou que Carpentras reçoit le Recteur et l’administration du nouvel état pontifical (fig. 14). Ce dynamisme d’une ville soudain portée sur le devant de la scène politique se caractérise en partie par une explosion démographique dont les conséquences se traduisent par un besoin exponentiel de logements. On doit construire beaucoup, vite et au prix le plus attractif pour des populations laborieuses de condition modeste. Dans le cadre de l’urbanisme, la réponse est celle du lotissement que l’on conjugue avec les solutions architecturales de la terre massive.
Grâce à l’exemple du « bourg » avignonnais on connaît le principe directeur de la formation d’un lotissement au début du XIVe siècle. Le propriétaire d’un terrain décide de le morceler en plusieurs parcelles qu’il concède à des particuliers moyennant le versement d’une acapte, autrement dit, un engagement à payer un cens annuel et l’engagement de construire dans un certain délai (67). Ces propriétaires de lotissements peuvent avoir différentes origines: bourgeois et nobles, ordres religieux et peut-être même le roi dans le cas de Perpignan. Les populations qui font construire les maisons en terre s’apparentent à un prolétariat ou à la partie laborieuse des classes moyennes, pour reprendre une terminologie actuelle. Dans le cas du quartier Saint-Jacques de Perpignan, la population est composée de petites gens et d’une grande proportion d’exclus dont les Juifs qui s’installent massivement sur les pentes du puig à partir de 1251.
L’implantation du lotissement sur un terrain est également conditionnée par un schéma directeur qui dépend du réseau viaire. Celui-ci peut être créé ex-nihilo comme cela semble être le cas à Perpignan pour les quartiers Saint-Jacques et Saint-Mathieu, à l’exception probable d’une ou deux anciennes grandes voies d’accès à la ville.
L’exemple de Carpentras est bien différent puisqu’il s’agit d’une ville antique dont la superficie s’est rétractée entre l’Antiquité tardive et les premiers siècles du Moyen Âge. Il apparaît que la création de lotissements s’est probablement traduite par une reconquête de l’espace urbain perdu depuis la fin de l’Antiquité. C’est sur des parcelles agricoles, pouvant conserver la trace de la cadastration romaine, que les lotissements en terre ont été implantés en bordure de chemins dont le tracé reprenait celui des rues de la ville antique.
Le lotissement est divisé en parcelles contiguës, alignées les unes aux autres et généralement disposées perpendiculairement à la rue (fig. 15). À Perpignan, les îlots ont une largeur légèrement supérieure à 20 m entre deux rues. Les parcelles ne sont pas traversantes car séparées au centre de l’îlot par un mur mitoyen qui détermine de chaque côté une maison d’environ 10 m de profondeur pour une largeur moyenne de 5 m. Les lotissements de Carpentras sont différents dans la mesure où la largeur d’un îlot entre deux rues dépasse régulièrement 30 m. Dès lors, l’éclairage de la maison, placée perpendiculairement à la rue, nécessite la présence d’une cour en cœur d’îlot.
Cette disposition paraît récurrente dans ces lotissements de Carpentras où les maisons d’une largeur moyenne de 5 m ont une profondeur variable. Le faubourg de Belvèze à Narbonne, probablement contemporain, semble connaître une disposition assez similaire alors que les îlots étudiés sur le site de Villeneuve-Bargemon à Marseille, plus anciens (XIIe -XIIIe siècle) sont nettement différents avec des parcelles traversantes d’environ 12 m et des maisons qui ne sont pas systématiquement accolées.
Ces quelques exemples prouvent la diversité du mode d’implantation des lotissements en terre et de leur organisation interne. Il convient cependant d’insister sur la juxtaposition des maisons construites souvent en série et sur leurs dimensions, variant entre 3,5 et 7 m de large pour 9 à 15 m de long.
L’architecture de la maison en terre de lotissement
Les études conduites à Perpignan et Carpentras nous ont apporté les éléments essentiels pour esquisser une restitution fiable de ces maisons en terre. La plupart des murs mitoyens étaient conservés avec, bien souvent, les pentes de toitures miraculeusement préservées par les surélévations postérieures au Moyen Âge ainsi que les traces d’encastrement des planchers et des pannes de charpente (fig. 16).Avec ces indications on peut préciser que la maison ne dépassait pas 6 m d’élévation en rive de toiture sur la rue pour 9 m au maximum en faîtage.
Ces dimensions modestes permettaient cependant l’agencement de deux, voire trois niveaux : un rez-de-chaussée, éventuellement consacré à une activité professionnelle (atelier, entrepôt, commerce, etc.), un étage pour l’habitat et enfin, un étage bas de plafond servant de grenier ou un demi étage de comble, conçu comme une mezzanine (fig. 17). À partir de ce module de base, on trouve quelques variantes où des murs de refend, perpendiculaires aux mitoyens, peuvent exister. Bien que cela n’ait jamais été clairement identifié, il y a de fortes probabilités pour qu’un mur qualifié de mitoyen soit en définitive un simple refend longitudinal. La maison serait ainsi constituée de deux modules dont la largeur est avant tout dictée par la portée maximale de petites poutres de faible section (maximum 5 m). Un mur en terre construit sur une série d’arcs, étudié dans un lotissement de Carpentras pourrait tout à fait correspondre à ce schéma (fig. 18). Dans un autre registre, on peut avoir un mur mitoyen à l’étage qui sépare deux cellules d’habitations distinctes alors qu’au rez-de-chaussée, ce mur est percé d’ouvertures qui relient deux pièces associées. À nouveau, à l’exemple des largeurs de parcelles, on s’aperçoit que sous une apparence stéréotypée, l’architecture de ces maisons en terre peut présenter une variété de formes et de dispositions intérieures qu’il est encore très difficile de comprendre.
À l’exception d’un exemple observé à Montagnac, il semblerait que les maisons en terre ne possédaient pas de cave et ceci pour des raisons structurelles et d’économie. En effet, une excavation dans le prolongement des murs nécessite un solide confortement en pierre dont la réalisation paraît disproportionnée par rapport à l’élévation de la maison. Toutefois, on ne peut pas exclure la possibilité d’une cave très réduite, située au centre de la parcelle et couverte d’un plancher.
L’assise de la maison peut être de différente nature: construite en pierre avec ou sans fondations ou bien constituée par le mur de terre directement posé sur le sol. Le plus souvent on trouve un soubassement en pierre, de hauteur variable et qui peut atteindre parfois le premier plancher (Béziers, îlot Saint-Mathieu à Perpignan).
Les départs de la maçonnerie de terre au niveau du sol sont plutôt l’exception (îlot Saint-Mathieu à Perpignan, Narbonne). Les fouilles archéologiques prennent ici le relais des études de bâti pour nous renseigner sur ce sujet.
À Narbonne et à Perpignan (îlot Saint-Mathieu), les deux cas de figures sont illustrés. L’exemple du site de Villeneuve-Bargemon à Marseille est également éloquent puisque l’on rencontre plusieurs cas distincts de fondations en tranchées surmontées d’un soubassement de préparation à la pose du pisé.
La façade sur rue ou sur cour de la maison en terre médiévale est un autre sujet de questionnement pour l’archéologue. En effet, les lotissements de Perpignan et de Carpentras, à ce jour les mieux documentés, n’ont livré aucune façade en terre car elles ont systématiquement été reconstruites à la fin du Moyen Âge ou à l’Époque moderne. Pour cette raison, l’étude de la maison en terre de lotissement pâtit de l’absence concrète d’indications sur la structure et l’aspect de ces façades. Les différents indices dont nous disposons grâce aux données de fouilles ou du bâti, conjugués à des comparaisons avec des édifices en terre récents, nous orientent vers quelques pistes privilégiées.
La façade en terre existe assurément car les fouilles de Narbonne, de Béziers et de Marseille l’attestent et aussi parce que le bâti d’époque moderne et contemporaine est présent pour en témoigner (68). Une première hypothèse s’impose : les façades des maisons de lotissement étaient intégralement construites en terre ou sur un rez-de-chaussée en pierre, et ont disparu progressivement car la présence de multiples ouvertures atténue l’effet de masse du mur et par conséquent nuit à la résistance de l’ensemble. Lors de la surélévation des maisons, le choix s’est orienté vers une destruction-reconstruction contrairement aux murs mitoyens. L’autre conséquence de ces destructions est la disparition fréquente des ouvertures percées en façade. On sait pourtant qu’une grande disparité de techniques permet de placer les baies dans un mur de terre : on trouve des ouvertures à encadrement de pierre ou de bois, insérées dans le mur de terre dès sa réalisation (fig. 19), ou bien un simple vide aménagé entre deux pans de terre massive (Trèbes, Béziers, Narbonne) (69).
Une deuxième hypothèse peut être proposée et n’est d’ailleurs pas incompatible avec la première: il s’agit de la présence d’un encorbellement à l’étage reposant sur une élévation de terre ou de pierre au rez-de-chaussée.
Cette proposition de restitution s’appuie d’une part sur les exemples de Perpignan et de Carpentras ou la largeur des rues médiévales (4,5 m) permet aisément une confrontation de deux façades de ce type de chaque côté de la rue. D’autre part, cette hypothèse se fonde sur la présence de pans de bois en encorbellement plus récents dans ces quartiers ou à leur périphérie (70). Bien évidemment, une multitude de solutions techniques s’offrait aux bâtisseurs pour édifier l’étage en surplomb. Des piliers en pierre ou en bois (pouvant également servir de jambages à des portes) devaient éventuellement se situer dans le prolongement des murs latéraux en terre (fig. 20), pour recevoir des pièces de bois de soutènement de la partie supérieure de la façade (71).
Les planchers et la charpente dans ces maisons de terre étaient très rudimentaires. On peut supposer que le bois d’œuvre utilisé était composé de simples grumes de faible section et de portée réduite. Les planchers étaient constitués de solives espacées d’environ 0,25-0,30 m ; une conception qui ne nécessitait pas de poutre intermédiaire en renfort dans les parcelles dont la largeur n’excédait pas 5 m. Dans le cas inverse on pouvait ajouter deux piliers (en façade et au centre de la pièce) pour soutenir deux poutres sur lesquelles reposaient deux rangs de solives. La disposition intérieure est parfaitement inconnue mais on peut suggérer une trémie en bois pour un escalier et des cheminées. Le cloisonnement pouvait être également conçu en terre ou bois et torchis.
La charpente ne diffère pas de la simplicité des planchers: des pannes sont placées en travers de la maison et décrivent une faible pente située entre 25 et 30 %. Les traces de pannes repérées dans le quartier Saint-Jacques de Perpignan démontrent à nouveau que les constructeurs cherchaient l’économie de matériaux en choisissant des poutres de petite section (0,25 m) placées à distance rapprochée et sur lesquelles étaient disposés d’inévitables chevrons. La couverture pouvait reposer directement sur des chevrons si elle était constituée de tuiles comme laisse à penser les découvertes du faubourg du Morier à Marseille. Une autre solution est proposée à partir des observations de Carpentras où la partie sommitale d’un mur latéral de maison possédait encore une découpe en escalier, interprétée comme les traces de pose de grandes voliges pouvant être couvertes de chaume.
Les modifications de ces maisons en terre, conçues pour de nouveaux arrivants dans des villes en plein développement, interviennent très rapidement. Les recherches dans le quartier Saint-Mathieu de Perpignan, comme à Montagnac, montrent que l’on surélève en terre les maisons primitives pour créer un niveau supplémentaire ou pour permettre la construction d’un lot voisin dont l’orientation de toiture change. À Carpentras, on remarque que les maisons construites en terre sont massivement percées d’arcades en plein cintre au rez-de-chaussée (fig. 21). Le percement a posteriori pour la plupart d’entre elles, est attesté par la forme des brèches qui sont pratiquées dans les murs de terre, colmatées avec des matériaux hétéroclites après la pose de l’arc. Ces percements d’arcs sont associés à des reconstructions de façades en encorbellement et en pans de bois (fig. 22). Le processus de remembrement des rez-de-chaussée de Carpentras est si important qu’il est délicat de situer la limite de ces nouvelles parcelles. Une impression de transformation du lotissement primitif en immense « souk » à l’orientale ressort de la restitution parcellaire que l’on peut ébaucher pour cette phase d’évolution datant probablement du milieu du XIVe siècle (fig. 23). Les arcades permettent la circulation entre d’anciennes pièces exiguës devenant des entrepôts ou des ateliers de grande taille qui débouchent bien souvent sur de vastes cours.
Les transformations vont se poursuivre dans ces lotissements qui ont résisté à la chute de la population au milieu du XIVe siècle. À partir du XVe siècle plusieurs parcelles d’origine sont rassemblées pour définir de vastes maisons avec cour où l’on édifie un escalier à vis desservant deux étages supplémentaires construits en pan de bois (Carpentras).
À Perpignan l’évolution est similaire car, dès la fin du Moyen Âge, les lotissements du quartier Saint-Jacques se transforment progressivement en une série de maisons assez vastes et confortables, conçues comme un modèle réduit d’hôtel particulier à partir de quatre ou six maisons médiévales remembrées au centre desquelles on perce une cour. Étrangement, ces ensembles constitués entre les XVe et XVIIIe siècles se désagrégent au XIXe siècle pour retrouver une disposition parcellaire presque équivalente à celle du lotissement médiéval.
Conclusion
Si l’archéologie permet aujourd’hui de détailler et de généraliser de nombreux aspects des maisons médiévales en terre – situation urbaine, types d’habitat, modèles architecturaux, procédés de mise en œuvre – ces connaissances ne concernent encore qu’une frange chronologique limitée au Moyen Âge tardif et des contextes essentiellement citadins. D’importantes lacunes restent à combler, pour cette période en ce qui concerne l’habitat rural et, pour les phases antérieures, afin d’établir la genèse de ces architectures tant du point de vue morphologique que de celui des modes de construction à base de terre crue. En outre, le lien n’est pas encore tout à fait établi entre la construction en terre médiévale et celle des époques modernes et contemporaines. Ce constat est particulièrement vérifiable en Provence où la construction en terre semble disparaître à partir du XVe siècle pour resurgir à la fin du XVIIIe siècle sous une autre forme, essentiellement rurale, avec l’emploi exclusif de la technique du pisé. On mesure ici l’importance de la poursuite des recherches, notamment en direction des régions Rhône-Alpines où l’art de bâtir en terre ne semble s’être jamais interrompu.
Bien évidemment, notre attention se porte prioritairement sur les nombreux centres anciens des villes et villages du sud de la France où le suivi, par des archéologues, des travaux de réhabilitation ou de restructuration urbaine, apportera sans aucun doute, à l’avenir, des éléments complémentaires de réflexion sur ce sujet.
- Archéologue, C.A.M.L. (Carcassonne).
** Chargée de Recherche, C.N.R.S. (Lattes).
*** Archéologue au Service d’Archéologie du département du Vaucluse (Avignon).
- Les auteurs de ces trois parties sont respectivement D. BAUDREU, C.-A. DE CHAZELLES et F. GUYONNET.
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- Les constructions en briques crues moulées signalées sur plusieurs gisements ne sont pas contestables a priori. Toutefois, maintenant qu’un procédé à base d’éléments modulaires façonnés ou découpés est largement démontré en Roussillon et en Languedoc occidental où il correspond à une des formes de la bauge (voir ci-après), il est possible que certaines découvertes de « briques » puissent être ré-interprétées.
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- Trop souvent revient le mot « pisé », terme galvaudé s’il en est, pour désigner toute construction en terre. Il est parfois employé à la place de « torchis » car les deux mots sont à tort considérés comme des synonymes, ou simplement pour parler d’une structure en terre dont le mode de mise en œuvre n’a pas été identifié. Or, comme essaie de le montrer cet article, le « pisé » procède d’une mise en forme de la terre très particulière et son cheminement historique pose encore des problèmes.
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- À Toulouse, les fouilles du Museum ont effectivement mis au jour des murs de terre massive de cette époque qui peuvent être en bauge ou en pisé (Jérôme BRIAND, Pascal LOTTI, Museum…). Celles du Lycée Ozenne ont révélé des parois de terre datées du XVe siècle probablement coffrées (Jean CATALO et alii, « La maison canoniale… », p. 389-404).
40.Alain KLEIN, « La construction en pisé procédant par banchées appareillées, en Midi-Pyrénées. Fin XVIIIe-début XIXe siècle. Contribution à la reconnaissance des différentes techniques », dans Échanges transdisciplinaires sur les constructions en terre crue. 2, Les constructions…, p. 157-179. - Yann HENRY et alii, Dominium-Providence (Montpellier). Rapport de fouilles. S.R.A. Languedoc-Roussillon, 2007.
- Le caractère encore isolé des découvertes de Carpentras tient sans aucun doute aux aléas de la recherche archéologique et on peut espérer que peu à peu les lacunes géographiques seront comblées entre le Languedoc, Marseille et la moyenne vallée du Rhône. (Nelly DUVERGER, François GUYONNET, Carpentras, Îlot Archier, 2e phase, Étude partielle du bâti, D.F.S., Service d’Archéologie du Département de Vaucluse, Avignon, 2005, 41 p.).
- Dominique BAUDREU, « Observations sur les constructions en terre crue dans l’Aude (Moyen Âge et Époque moderne) », dans Bulletin de la Société d’Études scientifiques de l’Aude, t. CII (2002), p. 57-64, et Dominique BAUDREU, « Habitats et fortifications en terre crue d’époque médiévale, dans le Midi de la France », dans Échanges transdisciplinaires sur les constructions en terre crue. 1. Terre modelée…, p. 359-375.
- François GUYONNET, Rue de l’Anguille. Étude des élévations, à Perpignan (Pyrénées-Orientales), D.F.S., I.N.R.A.P.-S.R.A. Languedoc-Roussillon, Montpellier, 2001, 101 p. François GUYONNET, Aymat CATAFAU, « La construction urbaine en terre aux XIIIe et XIVe siècles: l’exemple de la rue de l’Anguille (Perpignan) », dans Échanges transdisciplinaires sur les constructions en terre crue. 1. Terre modelée…, p. 389-411. Claire-Anne DE CHAZELLES, « La bauge dans les constructions du Languedoc et du Roussillon d’après les témoignages archéologiques du Néolithique à la fin du Moyen Âge. Essai de synthèse », dans E. PATTE et F. STREIFF (dir.), La bauge en Europe. Actes du colloque international d’Isigny-sur-mer, 2007, p. 211-231.
- Alain KLEIN, « La construction en terre crue par couches continues, en Midi-Pyrénées. XVIe -XXe siècles. Contribution à l’identification des techniques », dans Échanges transdisciplinaires sur les constructions en terre crue. 1. Terre modelée…, p. 417-437.
- Des fouilles préventives réalisées sous la direction de l’I.N.R.A.P. à Canohès et à Villeneuve-de-la-Raho (Pyrénées-Orientales) ont livré dans le premier cas des fondations de parois et dans le second une impressionnante muraille en terre massive: Jérôme KOTARBA, Céline JANDOT, Stéphanie RAUX, Rapport d’intervention sur le site de Manresa, à Canohès (66), I.N.R.A.P.-S.R.A. Languedoc-Roussillon, 2005. Céline JANDOT et alii, Rapport d’intervention sur le site de Villeneuve-de-la-Raho (66), I.N.R.A.P.-S.R.A. Languedoc-Roussillon, 2006.
- Dominique BAUDREU, « Habitats et fortifications en terre crue d’époque médiévale… », p. 359-375. Jérôme KOTARBA, « Quelques données sur l’habitat en terre d’époque carolingienne d’Augéry de Corrèges (Arles, Bouches-du-Rhône) », dans Échanges transdisciplinaires sur les constructions en terre crue. 1. Terre modelée…, p. 385-388.
- Élise FAURE-BOUCHARLAT, Alban HORRY, « La maison des champs entre Rhône et Alpes (Xe-XIIe siècles)… », p. 211. Élise FAURE-BOUCHARLAT, Jacques-Léopold BROCHIER, « Les établissements ruraux : implantation, organisation et architecture »…, p. 264-275.
- Jean BOYER, « Documents inédits sur la construction de cabanes en Camargue aux XVIIe et XVIIIe siècles »…, p. 131-142. Claire-Anne DE CHAZELLES, François GUYONNET, « La construction en pisé du Languedoc-Roussillon et de la Provence »…, p. 109-139.
- Alain KLEIN, « La construction en terre crue par couches continues, en Midi-Pyrénées. XVIe-XXe siècles… »…, p. 417-437.
- Jean-Marie PESEZ, « La construction en terre crue », dans Yves ESQUIEU et Jean-Marie PESEZ (dir.), Cent maisons médiévales…, p. 67-
- Claire-Anne DE CHAZELLES et François GUYONNET, « La construction en pisé… », p. 109-139.
- Cf. les travaux sur l’habitat médiéval à Montpellier et à Toulouse : Bernard SOURNIA et Jean-Louis VAYSSETTES, Montpellier : la demeure médiévale, Paris, 1991 (Études du Patrimoine, n° 1). Anne-Laure NAPOLÉONE, « Les maisons romanes de Toulouse » dans A.M.M., t. 6 (1988),
p. 230-232 ; « Les maisons gothique de Toulouse », ibid., t. 8-9, p. 121-127. - Tel semble être le cas à Barcelone et à Marseille: C. BATTLE, « La maison barcelonaise… » …, p. 46. Robert THERNOT et Muriel
VECCHIONE, « Les murs en pisé… », p. 439-450. - Jacques-Louis BROCHIER, « La place de l’architecture de terre… » …, p. 63-66. Robert THERNOT et Muriel VECCHIONE, « Les murs en
pisé… » …, p. 439-450. - Yann HENRY et alii, « Dominium-Providence (Montpellier)… ».
- Jérôme BRIAND, Pascal LOTTI (dir.), « Museum d’Histoire Naturelle, Toulouse… ».
- Claire-Anne DE CHAZELLES et Émilie LÉAL, « Les murs en terre crue d’un faubourg… »…, p. 247-261.
- Olivier GINOUVEZ, « Béziers. Habitations médiévales… ». Élian GOMEZ, Rue Maître Gervais, Béziers, Rapport de fouilles. S.R.A.
Languedoc-Roussillon, Montpellier, 2005. - Renseignement Dominique Baudreu.
- Robert THERNOT et Muriel VECCHIONE, « Les murs en pisé… » …, p. 439-450.
- François GUYONNET et Aymat CATAFAU, « La construction urbaine en terre… », p. 389-411. Isabelle REMY, « Des maisons de terre… »…,
87 p. François GUYONNET, « Les maisons en terre de la rue de l’Anguille à Perpignan: du lotissement médiéval au secteur sauvegardé », dans
Roches ornées, roches dressées: colloque en hommage à Jean Abelanet, Perpignan, 24-25 Mai 2001. A.A.P.O. Perpignan, Presses Universitaires,
2005, p. 497-512. - Claire-Anne DE CHAZELLES et François GUYONNET, « La construction en pisé… » …, p. 109-139. Nelly DUVERGER et François
GUYONNET, Carpentras, Îlot Archier, 2e phase… - Claire-Anne DE CHAZELLES et François GUYONNET, « La construction en pisé… » …, p. 109-139. Pour Montagnac et Lunel, études en
cours inédites. - Pierre GARRIGOU-GRANCHAMP, « Les maisons urbaines du Xe au milieu du XIIIe siècle », dans La Maison au Moyen Âge dans le Midi de
la France, Actes des journées d’étude de Toulouse, mai 2001, M.S.A.M.F., Hors série 2002, Toulouse, 2003, p. 75-107. - Dominique CARRU, Anne HASLER et Isabelle CARTRON, « Avignon, rue Carreterie », dans Notes d’Information et de liaison de la
Direction des Antiquités de la Région P.A.C.A., 1990, Aix-en-Provence, 1991, p. 169-171. - 67.Anne-Marie HAYEZ, « Les bourgs avignonnais du XIVe siècle », dans Bulletin philologique et historique du C.T.H.S., Paris, 1975, p. 77-102.
- Signalons qu’il est impossible en fouille de différencier un mur en terre sur rez-de-chaussée en pierre d’un mur intégralement construit
en maçonnerie de pierre. Pourtant ce type de façade existe dès le Moyen Âge. On peut citer deux exemples notables de façades en terre sur un
rez-de-chaussée en pierre : l’un à Trèbes (XIVe siècle) et l’autre à Béziers (XIVe siècle). Élian GOMEZ, « Rue Maître Gervais… ». - À titre comparatif, on peut signaler un exemple de fenêtre géminée gothique dans une élévation en pisé, à L’Arboçar de Baix, en
Catalogne: Joan Albert ADELL I GISBERT, « Notes per a l’estudi… », …, p. 345-352. - 70. À Perpignan, la plupart des pans de bois à encorbellement conservés dans certains quartiers du centre ancien sont plus récents (XVe
XVIe
) alors qu’à Carpentras des vestiges de ce type ont été rencontrés sur les premiers remaniements des maisons en terre que l’on date du
courant du XIVe siècle.
- Sur une maison du quartier Saint-Jacques de Perpignan, un exemple de pilier situé à l’extrémité d’un mur en terre était conservé.
Cependant, bien que d’aspect médiéval, on ne peut assurer que ce pilier ai été placé simultanément avec l’élévation en terre.